Après notre première nuit dans la jungle

27 juin 2006

Nous avons tous les traits tirés ce matin et mal partout ! Après le petit déjeuner, j´aperçois une jeune femme avec son bébé. Celui-ci a une vilaine inflammation sur le torse, infectée. 
Ma conscience de médecin m´empêche de rester sans rien faire, d´autant que nous avons apporté quelques produits de base pour le trek. 

Je donne à la mère des compresses stériles et du désinfectant et demande à Ed de traduire pour expliquer comment faire à la maman. Il rechigne à la tâche, me dit que ça ne sert à rien et traduit le tout en à peine 2 minutes.
Comme je n´ai pas confiance en ce qu’il a traduit, j´emmène la maman à l’intérieur et lui montre comment se laver les mains et désinfecter la plaie. Elle a l´air attentive. Espérons qu’elle ait compris !

Puis nous partons tous les 4 avec Ed et sa femme à la cascade située à 1/4 d’heure. C´est une charmante cascade qui nous apparait comme la plus merveilleuse des piscines. 
On barbote, on s´amuse … Ed et sa femmes sont mis dans un coin et roucoulent. Il partent avant nous, ce qui nous permet de nous apercevoir avec stupeur que Ed a gravé son non sur une pierre. Ne serait- il pas un peu mégalo ?

De retour à la maison, notre repas nous attend et pas seulement lui ! Un homme vient vers moi pour me montrer une vilaine plaie du pied qui va jusqu’à l’os. Il n´était pas la ce matin et habite dans un village plus loin. 
Comment a- t-il su aussi vite qu’l y avait quelqu’un pour le soigner ? Je regarde, c´est vraiment moche.

De nouveau, lavage, désinfection et gros pansement. Je lui explique de surtout maintenir le pansement au sec, de ne pas marcher dans la boue. Il parle quelques mots d´anglais et me comprend. Evidemment, il faudrait que son pansement soit refait régulièrement.

Ed se moque de moi, et me dit que ce que je viens de faire, ne sert a rien. Ce qu’il m´énerve celui là ! 
N´y a t il pas d´infirmière sur cette ile ? Mais si, répond Ed, au village gouvernemental, à une heure de marche, et d´ailleurs le fils de cet homme y habite. Alors pourquoi n´y est- il pas allé ? c´est payant. Alors il préfère garder l´argent pour acheter des cigarettes …

Je me demande si c´est vrai, car je n´ai pas confiance en Ed. Mais si c´est le cas, j´aurais fait tout ça pour rien.

Apres le déjeuner, nous commençons notre trek pour rejoindre un 2ème village. Le trek est très éprouvant car nous marchons dans la boue, ou sur des troncs d´arbres ou des bambous glissants en équilibre. 
Parfois, il nous faut passer sur des arbres au dessus de petits cours d´eau, en équilibre précaire…

Des fois, il faut traverser des cours d´eau dont le fond est boueux. Chaque fois que quelqu’un s´enfonce dans la boue (jusqu’au genou parfois), on entend “oh mince!” ou “ah…”. Bien sur les autres en profitent pour rire et prendre des photos!!!
Comme il fair très chaud et humide, on dégouline de partout.

Sur le chemin, Edda demande à Ed des renseignements sur un fruit inconnu, situé près d´un bananier. 
Ed répond, avec un grand sourire : une banane. Mais la plaisanterie ne fait pas du tout rire Edda qui se fâche et se met très en colère contre Ed en le traitant de guide nul, que ses blagues ne font rire que lui, et qu’il ferait mieux de nous expliquer des choses, qu’il est assez bien payé comme ça.

On n´ose pas intervenir car Edda est suffisamment énervée, mais au fond, nous pensons tous comme elle… Ed se perd en justifications.

Au bout de 3h30, nous arrivons en fin à la maison et courons rapidement nous laver dans la rivière. Notre plaisir est de courte durée car de petites insectes noirs (des mouches?) nous piquent partout. 
C´est une horreur!

Dans la maison, une vieille femme toute ridée, vient nous voir et nous demande des cigarettes. Elle me fait des sourires et touche mes cheveux dont la couleur a l´air de lui plaire.
Nous sommes un peu surprise que les Mentawaïs viennent tous nous demander des cigarettes, et cela est un peu énervant, comme s´ils se réjouissaient de voir des touristes juste parce qu’ls savent qu’ils apportent des cigarettes.

Est-ce un besoin crée par les touristes? Non, selon Ed, car ils fumaient avant que les touristes ne viennent. Mais avec nous, ils les ont à l´oeil…
On se sent un peu “racketté”. C´est sur, nous avons acheté les cigarettes pour eux mais on pensait les offrir, comme cadeau, plutôt qu’elles soient réclamées.

D´un autre sens, ne sommes-nous pas un peu profiteur également car nous venons sur Siberut en grande partie pour voir le peuple mentawais?
Les Mentawais ont gardé leurs coutumes ancestrales comme peu de peuple aujourd’hui. Ils vivent dans des endroits reculés de la jungle dans un milieu très hostile.

Ils sont restés très longtemps coupes du monde extérieur, jusqu’au XIXème siècle où sont apparus les 1ers hollandais. 
Ils vivent en autarcie, pratiquent le troc, vivent de cueillettes, un peu de chasse (singe notamment), un peu d´élevage (poules et cochons aux yeux bleus!) et trouvent tout ce dont ils ont besoin dans la foret. 

Pas d´électricité, pas d´eau courante… des tatouages à l´encre végétale sur tout le corps, des torse nus, des chamans pour célébrer les fêtes rituelles.
Mas aussi une société regroupée en clans familiaux, sans écriture et sans calendrier. Personne ne connait donc son âge! Peut-on imaginer société plus éloignée de la nôtre???

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